Villas fleuries à Cagnes : le combat s’intensifie
Le maire de Cagnes est-il en droit de dénoncer une « manipulation politique » après la réunion publique houleuse de ce 28 mars 2025 sur le projet immobilier municipal qui pèse sur les maisons de pêcheurs ?
« Monsieur Woignier, soutenez-vous l’extrême-droite ? »
« Monsieur Woignier, soutenez-vous l’extrême-droite ? ». Derrière cette question, il y a des accusations de la majorité municipale qui lui reproche d’avoir placé des élus d’extrême-droite au premier rang de la manifestation du 8 mars contre le projet de la municipalité en face des Villas fleuries. Et qui reproche à l’extrême-droite d’instrumentaliser ce dossier à des fins électorales.
Réponse de Jean-Pierre Woignier : «C’est une accusation que vous portez dans votre dernier prospectus, M. le maire. Non je ne soutiens pas l’extrême-droite, et notre association est apolitique. Le 8 mars, j’ai invité les élus au premier rang derrière la banderole. J’assume ce choix. Vous n’y

étiez pas puisque votre projet est contraire à ce que nous défendons. Quant aux élus de gauche, il n’y en a plus depuis les élections de 2020. Mais M.Garoyan était juste derrière et il a déclaré ‘‘J’ai été traité de manière égale aux autres, je dénonce la manipulation qui voudrait faire croire le contraire’’. Au premier rang il n’y avait donc que le député et des élus de l’Alliance des droites (1) ».
« Je ne suis dans aucun parti politique. Je l’ai été à une époque et j’ai le regret de dire que c’était celui… de M. le maire » a ajouté Jean-Pierre Woignier.
1-Au sein du conseil municipal de Cagnes, l’Alliance des droites regroupe Josiane Piret, ancienne première adjointe de Louis Nègre ; Jean-Paul Pérez et Karin Hartmann, qui ont quitté le Rassemblement national ; et Michel Lebon qui « n’a jamais adhéré à aucun parti ».
Photos : J.-Pierre Woignier (à droite) : « Non M. le maire, je ne suis dans aucun parti politique ». Louis Nègre : en campagne électorale contre l’extrême-droite ? (Photos L.Q.)
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Quelle manipulation politique ?
Après la réunion, sur sa page Facebook, Louis Nègre a crié à la « manipulation politique » et au « verrouillage ». Pourtant, force est de constater qu’il a pu poser une question, ainsi que son adjointe déléguée au social. Deux questions d’élus de la municipalité, c’est-à-dire un tiers des 6 questions au total qui ont être posées par la salle ! Un seul autre élu municipal, d’opposition, a posé une question : Philippe Touzeau-Ménoni, de l’Union pour Cagnes. On peut ajouter que public aurait pu en poser davantage si le maire n’avait pas paralysé la réunion durant un bon moment en voulant à tout prix imposer son discours en violation des règles annoncées et acceptées par tous en début de réunion.

Par ailleurs, l’extrême-droite était loin d’être la seule dans la salle. On a pu remarquer la présence du conseiller municipal centriste Philippe Touzeau-Ménoni, mais aussi de Michel Santinelli, figure de la gauche à Cagnes, et d’élus de l’équipe municipale de Louis Nègre, sa propre liste n’étant pas la moins nombreuse !
De toutes couleurs politiques… sauf l’équipe Nègre
Jean-Pierre Woignier a toujours dit qu’il compte sur tous les soutiens dans le combat de la Casa du Cros contre le projet du maire en face des Villas Fleuries. Soutiens politiques ou non, et quand ils sont politiques quelle que soit leur couleur, de gauche, du centre, de droite, de l’écologie ou d’ailleurs. La manifestation du 8 mars avait d’ailleurs réussi le tour de force de réunir pratiquement tout le panel politique… à l’exception fort logique de la municipalité.
Qui est en campagne électorale ? Et qui manipule quoi ?
Le maire dénonce le début de la campagne électorale. Mais sa focalisation contre l’extrême-droite montre bien qu’il est lui-même en campagne, et qu’il considère l’extrême-droite comme le principal danger pour lui. Le paradoxe est qu’en s’arc-boutant ainsi sur son projet très contesté des Villas fleuries, un patrimoine de tout Cagnes et des Alpes-Maritimes, Louis Nègre risque fort de faire le lit de ses opposants… et d’abord de l’extrême-droite.
La stratégie du rempart contre l’extrême-droite ?
Louis Nègre dénonce le début de la campagne électorale municipale. Mais pourquoi la question de la mosquée a-t-elle refait surface en novembre dernier lors d’un conseil municipal, d’abord dans la bouche du commissaire de la police nationale qui avait été invité en séance par Louis Nègre ? Puis par le maire lui-même ? Fragilisé depuis sa réélection avec moins de 50 % des suffrages exprimés au second tour des municipales en 2020, Louis Nègre a besoin de toutes les voix possibles.
Sa stratégie serait-elle de se poser en dernier rempart contre l’extrême-droite ? C’est ce qu’a fait Emmanuel Macron lors de la dernière élection présidentielle. On voit où cela a mené aujourd’hui au niveau national. A la paralysie et à une polarisation qui fait monter l’extrême droite. Quel sera le résultat à Cagnes ?
Photo : En tête de la manifestation organisée par la Casa du Cros le 8 mars 2025, la banderole était tenue par le député RN Bryan Masson, entouré de son suppléant Cyril Tribuiani et de la conseillère municipale Alliance des droites Josy Piret. Mais aussi par Jean-Paul Pérez et Karin Hartman, conseillers municipaux Alliance des droites. Ce que dénonce le maire.
Qui n’a pas respecté la démocratie ?

Cerise sur le gâteau, durant la réunion, on a entendu le maire s’offusquer et crier au déni de démocratie. Or non seulement il a pu poser une question ainsi que son adjointe aux Affaires sociales (lire ci-dessus), mais force est de constater qu’il a été le premier à vouloir s’affranchir des règles que tout le monde avait acceptées en début de séance, y compris lui. A commencer par la règle qui était de ne poser qu’une question courte. Il a été le premier à vouloir imposer sa promotion de son projet immobilier alors que ce n’était aucunement le but de la réunion. En monopolisant longuement la parole en dépit des huées et des injonctions de se borner à poser sa question, il a empêché le public de poser autant de questions qu’il l’aurait voulu. Est-ce cela la démocratie ?
« Oui à un débat public, mais dans le cadre d’un référendum »
Jean-Pierre Woignier a-t-il refusé le débat public ? Il avait déjà répondu au maire sur cette question dans Nice-Matin le 27 mars : « Après trois années d’ignorance de nos propositions et de refus d’envisager sérieusement notre projet de substitution, je peine à voir l’intérêt réel d’un débat au cours de notre réunion du 28 mars (…) Si votre intention est simplement de justifier un projet déjà verrouillé, cette discussion n’aura d’autre utilité que de masquer l’absence de concertation qui a prévalu jusqu’ici. »
Et de renvoyer la balle à Louis Nègre : « Un débat public, oui M.le maire, je ne le refuse pas. Mais on le fera quand vous organiserez un référendum. Et dans le cadre de ce référendum. »
Une réunion qui a « dégénéré » ?
« La réunion a dégénéré (…) Tous les coups sont permis. On n’est pas loin du pugilat » a-t-on pu lire dans la presse. Pourtant, malgré le forcing du maire qui a paralysé la réunion pendant un bon moment, et les huées que ça lui a attiré, force est de constater qu’il n’y a eu aucune violence, aucune intervention de la police municipale, et que la réunion a pu se poursuivre au-delà de la durée prévue, avec des questions… même si leur nombre a dû être réduit compte tenu de l’heure.
Duel Blondel - Nègre, à nouveau
« Tu n’as pas honte de t’imposer comme ça, Louis ? Tu ne me fais pas peur ! » Quand le maire a fait le forcing en monopolisant la scène pour faire la promotion de son projet, une petite octogénaire a fini par saisir le micro pour lui intimer de rentrer dans le rang comme tout le monde.
Tout le monde dans la salle l’a reconnue : Jeannine Blondel, présidente de l’association France nature environnement, qui combat depuis des années la bétonnisation du département, et notamment de Cagnes. Et qui est la cheville ouvrière de plusieurs recours en justice contre des permis de construire accordés par le maire.

La fin de nos articles sur ce sujet sera publiée le 2 avril 2025